* cliquez ici si vous préférez lire ce message dans votre navigateur * * Transférez ce mail avec les auteurs de votre entourage et offrez-moi un café | On vous a transmis cet email : inscrivez-vous pour recevoir les suivants * Annonce : pour la première fois depuis 2023, j'anime cet été un stage d'écriture de nouvelles pour 6 auteurs. Détails ici. En ce moment, je lis La Ballade du Serpent et de l'Oiseau Chanteur, de Suzanne Collins, et je râle face aux facilités d'écriture qui composent ce texte : antagonistes et personnages secondaires caricaturaux, enjeux du protagoniste artificiels, personnages dont les actions peinent à dessiner des individus vraisemblables... L'effet "marionnettiste"Je sens la main de l'autrice, je sens qu'elle est derrière chaque mot comme une marionnettiste qui ne réussit pas à me faire oublier les pantins et les fils qui les agitent. L'écriture est facile et il y a un personnage dont j'ai envie de connaître l'histoire, un seul sur la totalité du roman, un personnage qui n'apparaît que rarement dans la narration, dont je guette les apparitions... et je crois bien que je vais être déçu par l'issue de tout ça. Je suis aux deux tiers de l'histoire et même ce personnage-là, qui semblait pourtant avoir une colonne vertébrale solide, même ce personnage-là a été posé là dans les postures qui arrangent l'autrice. Je m'accroche à l'espoir que je vais être surpris, qu'un retournement final va me montrer que les personnages ont davantage de densité que ce qui a été donné à voir jusqu'à présent, que c'est le point de vue du narrateur qui nous maintient dans l'illusion qu'ils sont superficiels. Mais plus j'avance, plus je doute que cet espoir sera satisfait. En effet, plus j'avance, moins il y a de place pour un renversement de point de vue qui ne semble pas forcé. Et c'est le problème quand on travaille sur des projets trop longs (le livre compte 600 pages), c'est le problème quand nous pensons à la globalité du projet au détriment de la logique de chaque instant. Ce qui rend une histoire intéressante, c'est...Une histoire se construit dans l'imaginaire du lecteur, dans ses réactions émotionnelles, scène par scène, action par action, phrase par phrase. Une histoire ne devient une expérience globale qu'après coup, quand le lecteur est arrivé au bout (s'il y arrive). Ce qui intéresse le lecteur, c'est l'expérience que nous lui offrons ici et maintenant, sur la page qu'il est en train de lire. S'il s'ennuie, s'il ne perçoit pas la logique, si les ficelles sont trop grosses, si les personnages manquent de chair, si les décors flottent trop, le lecteur risque de décrocher... et de ne pas raccrocher. ... de savourer l'instantEn parallèle, je lisais Kitchen, de Banana Yoshimoto. C'est peut-être moins spectaculaire, il y a moins de personnages, moins de rebondissements, mais chaque instant est chargé de vie, d'humanité, de vraie fragilité et de justesse. Ce qui fait la différence, à mon avis, c'est le soin donné à chaque scène. Là où Suzanne Collins déroule les événements comme si elle avait besoin de vite franchir les étapes de son intrigue ; Yoshimoto savoure les instants. Résultat : nous les savourons avec elle. L'histoire nous touche au-delà du divertissement qu'elle offre, et les personnages restent avec nous comme de vieux amis dont on se souvient avec nostalgique. Ce résultat n'est pas magique, il repose sur une attention particulière pendant l'écriture, et cette attention s'apprend.Elle repose sur un axe de questionnement centré sur le personnage : Qu'est-ce qui est en jeu pour ce personnage, dans cet instant ? Qu'est-ce qui importe ? Qu'est-ce qu'elle remarque dans son environnement ? Qu'est-ce que tout cela lui fait ressentir ? Comment ces émotions modulent son action ? Ces questions sont valables aussi bien pour des histoires dites "plot-driven" (mues par leur intrigue) que pour des histoires "character-driven" (mues par leurs personnages). La différence sera que dans le premier cas, les événements provoqueront les réactions des personnages et les emporteront presque malgré eux dans l'intrigues. Dans le second cas, ce sont les états du personnages et ses moteurs d'action qui déclencheront la majorité des événements et qui donneront naissance à l'intrigue. Même les intrigues fortes ont besoin de densitéOn pourrait être tenté de se dire que dans les histoires à intrigue forte (policier, action, catastrophe, thriller...), l'intrigue est suffisante, mais ce serait oublier le fait que toutes les intrigues sont vécues par des personnages et que c'est cette lentille du personnage qui apporte de l'humanité et de la vraisemblance à une histoire. On se souvient d'autant mieux des événements qu'ils n'ont pas été associés à une réaction signifiante d'un personnage (émotion, enjeux). Ça ne veut pas dire qu'il faille tomber dans un excès de "psychologisation" des personnages. Une histoire n'est pas une psychanalyse. Il ne s'agit pas multiplier les espaces d'introspection, les voix internes. La justesse d'un personnage se mesure à ce qu'il fait, pas à ce qu'il pense. La justesse se trouve dans la forme cohérente qui se dessine quand un personnage agit selon une ligne qui lui est propre, quand il réagit comme c'est pertinent en fonction de sa caractérisation, et pas comme c'est pratique ou arrangeant pour l'histoire. Expérimenter scène par scèneEssayez dans une scène. Posez-vous la question de la relation entre les événements et le personnage. Puis passez à une nouvelle et observez comment le fait de développer un récit plus complexe change votre rapport au personnage. Vous pouvez ressentir que votre attention est tiraillée, voire écartelée, entre la nécessité de construire une histoire cohérente sur la durée et la nécessité de construire des situations justes dans chaque scène. En effet, nous ne devons négliger aucun de ces aspects du texte. Ni la justesse immédiate ni la cohérence globale. Viser juste avant de viser grandSi c'est déjà difficile sur une scène et plus difficile pour une nouvelle, imaginez comment cela devient quand vous abordez un projet plus complexe. La complexité peut venir de la longueur du projet, du nombre de personnages, du nombre de péripéties, de la complexité des décors, de l'introduction d'intrigues multiples...). C'est pourquoi je préconise de vous entraîner d'abord sur des textes simples avant de vous attaquer à des projets plus complexes. Et si vous faites partie de ces auteurs qui vont spontanément vers des idées complexes, pas de souci. Découpez votre projet en unités simples et travaillez sur chacune séparément. Je récapitule : La texture d'un texte, ce qui le rend intéressant, c'est la qualité de ses scènes.Celle-ci se mesure à l'attention que vous portez à la justesse des personnages, des décors, des événements, et au fait que vous n'utilisez pas ces éléments seulement à votre service, mais que vous vous mettez à leur service. Une série de questions simples vous aidera à vérifier que vous êtes dans cette qualité d'attention. Vous pouvez utiliser ma liste ou créer la vôtre, tant que vous vérifiez la cohérence entre la caractérisation intime du personnage et ses actions (sa "justesse"). Pratiquez cette approche avec moiLe mieux pour intégrer cette façon de diriger son attention, c'est de l'expérimenter. Vous pouvez le faire sur vos projets dès maintenant, et vous pouvez me rejoindre les 12 et 13 juillet prochains pour un stage d'écriture de nouvelles (le premier depuis 18 mois). Vous y développerez une histoire courte en suivant une méthode centrée sur la recherche sensible de la justesse des personnages et de l'incarnation du récit. Et puis, ce sera fun ! PS : je vous redonne ma liste de questions (non exhaustive). Utilisez-la pour développer votre propre grille d'écriture.
PPS : Une histoire réussie repose sur la justesse immédiate de chaque scène, pas seulement sur une intrigue globale bien ficelée. Et cette justesse s’apprend. Je la travaillerai avec 6 auteurs les 12 et 13 juillet prochains à l'occasion de mon nouveau stage d'écriture de nouvelles. **** Quand vous serez prêt à travailler avec moi...
|
J'écris pour les auteurs qui veulent construire une pratique durable et fidèle à leur vision artistique. Je partage mes outils et mes réflexions sur le métier d'auteur de fiction dans deux à quatre articles par mois. Je vous inviterai aussi régulièrement à des formations pour aller plus loin dans la construction d'une écriture qui vous ressemble.
* cliquez ici si vous préférez lire ce message dans votre navigateur * * Transférez ce mail avec les auteurs de votre entourage et offrez-moi un café | On vous a transmis cet email : inscrivez-vous pour recevoir les suivants * Bonjour, Nous écrivons pour faire sens du monde et poser notre attention sur ces moments de nos vies qui sont les plus chargés de sens : ... un rêve, ... un morceau de notre imaginaire, ... une rencontre réconfortante, ... un moment pendant lequel nous échappons à la...
* cliquez ici si vous préférez lire ce message dans votre navigateur * * Transférez ce mail avec les auteurs de votre entourage et offrez-moi un café | On vous a transmis cet email : inscrivez-vous pour recevoir les suivants * Mes articles vous plaisent ou vous aident ? Mon podcast vous fait avancer ? Mes contenus existent grâce à votre participation. Vous pouvez soutenir leur création en m'offrant un café ☕️ ou en m'envoyant vos questions d'écriture. Il y a une croyance qui me remue le bide...
* cliquez ici si vous préférez lire ce message dans votre navigateur * * Transférez ce mail avec les auteurs de votre entourage et offrez-moi un café | On vous a transmis cet email : inscrivez-vous pour recevoir les suivants * Mes articles vous plaisent ou vous aident ? Mon podcast vous fait avancer ? Mes contenus existent grâce à votre participation. Vous pouvez soutenir leur création en m'offrant un café ☕️ ou en m'envoyant vos questions d'écriture. Je vous ai parlé la semaine dernière d'un...